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La Semaine sainte 2020 à Calvi dell’Umbria

Frère Elie

Mercredi saint
Tout a commencé durant la messe de 19 h 15. Nous recevions la communion, Frère Elie s’approche aussi, lentement. Je suis très anxieuse, je sens que d’ici peu sa passion commencera. Il revient à sa place. Je me retourne pour lui jeter un coup d’œil, il a appuyé sa tête sur le banc, j’entends qu’il se lamente à voix basse, quelques secondes et il tombe à terre. Impressionnés, nous le secourons, l’étendons un peu mieux, un coussin sous la tête et nous attendons. Son corps commence à trembler, il se replie avec les mains dans le dos et commence à «grogner» sous l’emprise de la douleur, avec sur le front une blessure que j’appelle le «stigmate».
Quelques instants et à mi-voix, il récite une sorte de prière incompréhensible. Puis il se tourne et de la main droite élevée vers le haut, il se soulève lentement (comme si quelqu’un le soulevait et lui parlait). Il s’assoit et toujours avec le regard en haut, il ouvre les yeux, reste ainsi quelques secondes, fait des hochements de tête, se relève encore et se met à genoux. Les mains jointes, il commence à prier toujours en gardant les yeux vers le haut. Nous aussi, nous nous agenouillons et attendons cinq minutes. Frère Elie se relève, nous regarde perdu, sort de la chapelle. Nous le suivons, il prend une bouffée d’air et retourne au réfectoire. Il regarde autour, comme s’il ressentait la présence de personnes, nous dit que le réfectoire est plein de gens (les âmes des défunts), puis, tout dépaysé, court encore dans le cloître… «Mariellaaa» crie-t-il, (c’est sa nièce morte) … il converse avec elle, assis sur un banc, puis avec d’autres âmes qu’il dénomme toutes par leur nom. Puis il nous regarde, sourit et prend congé de nous en allant dans la chambre en nous saluant… La passion de Frère Elie est commencée.

Jeudi saint
8 h 30
Après le petit-déjeuner, avec mes confrères nous allons voir Frère Elie pour le saluer. C’est une mare de sang, les yeux fermés, le rosaire bien serré dans les mains. Nous restons en silence quelques minutes puis nous sortons sans le déranger.

10 h 30
Don Marco nous appelle, nous accourons tous dans sa chambre, Frère Elie est éveillé, je m’approche de lui et lui prends la main délicatement pour lui faire sentir que nous sommes là.
Il ne voit pas, ses yeux sont couverts de sang au point de le rendre aveugle. Nous parlons de beaucoup de choses pour le distraire un peu. Il souffre beaucoup, chaque partie de son corps est douloureuse; je lui donne un peu d’eau à boire, parce que le sang lui sort de la bouche. D’une faible voix, il commente: «Quand tu vas de l’autre côté, tu te sens léger, puis quand tu retournes par ici, tu est lourd. Même Rufin ne tient pas ce corps lourd, je vais et je viens et chaque fois je me sens plus faible.»
Puis il raconte qu’ils l’ont porté voir où beaucoup d’enfants meurent, des anciens aussi, beaucoup de maladies… ils sont en train de faire la procession et de rentrer tous à la maison du Père, à travers un grand arc-en-ciel. Puis il se laisse aller dans son silence et nous sortons de sa chambre en le laissant dans sa souffrance.

Vendredi saint
8 h 30
Nous entrons dans sa chambre en silence, il entend nos pas, nous nous approchons de son lit et d’un fil de voix il raconte: «La Madone du Carmel est venue, elle m’a donné la communion, elle a mis le manteau sur le lit, elle a mis en ordre la chambre et elle est repartie.»
Puis il raconte qu’il est allé dans un lieu où ils sont tous en ligne, comme une procession, il y a beaucoup de personnes, des milliers: rois, princes, vierges et enfants, tous veillés par des sages qui les séparent pour les conduire à leurs propres destinations… puis il a vu les prêtres et les saints autour de la gloire de Dieu.
Les anges qui chantent en chœurs mélodieux et au fond, c’est Lui qui, entouré d’une lumière éclatante les bénit tous, tandis qu’on répand un encens juste au-dessus d’eux, jusqu’à ce qu’il se dissipe.

17 heures
Je me trouve dans le cloître lorsque avec grande emphase, la voix de Don Marco nous appelle. Je cours et je vois Frère Elie habillé avec pantalon, chemise, le visage ensanglanté, soutenu par Don Marco.
Je reste ébahie, stupéfaite… il est sorti de sa chambre!
Je lui demande d’expliquer: «Frère Elie, qui t’a habillé?» «Ce sont eux, ils sont venus, ils m’ont habillé et ils m’ont dit de descendre prier avec vous.» Je suis toujours plus étonnée. Ses yeux ouverts montrent deux pupilles dont l’iris est incroyablement bleu comme le ciel… Et tournant dans le cloître, il semble que quelqu’un le soulève de terre… il entre dans la chapelle, salue et reste prier avec nous en faisant tout le chemin de Croix.
Au terme, il se dirige seul vers sa chambre, droit, comme si quelqu’un le tenait. Puis il nous dit que ces yeux n’étaient pas les siens mais ceux de Jésus. Il lui a dit lui-même: «Je t’ai mis mes yeux.» Brillants, célestes et grands!  Quelle émotion! Il lui a dit que chaque année ils le feront lever pour prier avec nous…

Samedi saint
8 h 30
Je monte dans la chambre de Frère Elie, m’approche de son lit et à ma grande surprise, j’assiste au miracle de l’Eucharistie. Mon cœur bat à la folie tandis que je vois cette subtile hostie entre les lèvres de Frère Elie. Il cherche à la faire entrer dans sa bouche. Je m’agenouille, parce que je comprends que je suis en présence (sans la voir) de la Madone. Quelques instants et Frère Elie se réveille et me dit: «C’est la Madone, elle m’a donné la communion, nous avons parlé. Elle m’a grondé, en me disant que je devais réciter le Rosaire correctement: à chaque grain, je dois mettre une intention et à la fin de la messe on doit toujours réciter les prières de l’Ange de Fatima. Nous devons le transmettre à tous, parce que c’est la prière de la purification de l’homme.»
Il parle péniblement. Il est très fatigué et souffre beaucoup. Je lui change la serviette sous la tête et le quitte en le laissant seul.

15 heures
Je suis avec mes confrères à attendre devant la porte de la chambre de Frère Elie qu’il sorte. C’est 15 h 01 et il sort. Nous allons à sa rencontre. Il salue en premier Don Marco et puis il nous embrasse tous. Il est si maigre, pâle, avec un fil de voix, tout propre, sans signe sur le visage, seulement de petites cicatrices autour du front. Il retourne titubant dans sa chambre, mais arrivé à sa porte, il tombe. Nous le secourons, et nous l’étendons à terre comme nous pouvons. Il est en extase, ses yeux sont ouverts vers le haut, tandis qu’il bouge ses lèvres comme s’il parlait avec quelqu’un. Puis il tend son bras vers le haut comme pour se faire aider pour se relever et lentement, il se remet debout et rentre dans sa chambre. Il se remet sur pieds pour pouvoir descendre avec nous à la chapelle. Aujourd’hui, c’est sa renaissance! Bienvenue Frère Elie, parmi nous!

Sœur Maria, «Angeli e Arcangeli», maggio 2020, no 48, pp. 13-14

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