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Le royaume du Monstre des abîmes

Maria Valtorta - «Les Cahiers de 1944»

En ce mois dédié aux fins dernières, qui peut être le mieux placé que Jésus pour en parler?

Jésus dit:


«Une fois, je t’ai fait voir le Monstre des abîmes. Je vais aujourd’hui te parler de son royaume. Je ne peux pas toujours te garder au paradis. Souviens-toi que tu as pour mission de rappeler certaines vérités à tes frères qui les ont trop oubliées. Ce sont ces oublis, qui sont en réalité du mépris pour les vérités éternelles, qui sont la cause de tant de maux pour les hommes.
Ecris donc cette page pénible. Ensuite, tu seras réconfortée. C’est la nuit du vendredi. Ecris en regardant ton Jésus, qui est mort sur la Croix dans des tourments tels qu’ils sont comparables à ceux de l’enfer et qui a voulu cette mort pour sauver les hommes de la Mort.
Les hommes d’aujourd’hui ne croient plus à l’existence de l’enfer. Ils se sont échafaudés un au-delà à leur convenance et tel qu’il soit moins terrorisant pour leur conscience, qui mérite bien des châtiments. Disciples plus ou moins fidèles de l’Esprit du Mal, ils savent bien que leur conscience reculerait devant certains méfaits, s’ils croyaient réellement à l’enfer comme la foi l’enseigne. Ils savent que leur conscience, une fois leur méfait commis, ferait retour sur elle-même et trouverait le repentir dans le remords ou dans la peur et, grâce au repentir, la voie pour revenir à moi.


Leur malice, instruite pas Satan dont ils sont les serviteurs ou les esclaves (suivant leur adhésion aux volontés et aux suggestions du Malin) ne veut pas de tels reculs et de tels retours sur soi. Par conséquent, l’homme abandonne la foi à l’enfer tel qu’il est réellement et s’en fabrique un autre – si du moins il s’en fabrique un –, qui n’est en fait qu’une pause pour prendre son élan vers d’autres élévations futures.
Il va si loin dans cette opinion qu’il croit de façon sacrilège que le plus grand de tous les pécheurs de l’humanité, le fils bien-aimé de Satan, celui qui était voleur comme le dit l’Evangile, concupiscent et avide de gloire humaine comme je le dis, moi: Judas Iscariote, a pu être sauvé et parvenir jusqu’à moi en passant par des phases successives, alors que, poussé par la triple concupiscence, il est devenu marchand du Fils de Dieu et que, moyennant trente pièces et un baiser comme signe – une valeur monétaire dérisoire et une valeur affective infinie –, il m’a livré aux mains des bourreaux.


Non. S’il fut le sacrilège par excellence, moi je ne le suis pas. S’il fut l’injuste par excellence, moi je ne le suis pas. S’il fut celui qui a répandu dédaigneusement mon Sang, moi je ne le suis pas. Pardonner à Judas serait un sacrilège envers ma divinité qu’il a trahie, ce serait une injustice envers tous les autres hommes, toujours moins coupables que lui et qui sont pourtant punis pour leurs péchés, ce serait mépriser mon sang, enfin ce serait ne pas tenir compte de mes lois.
J’ai dit, moi qui suis le Dieu un et trine, que celui qui est destiné à l’enfer l’endure pour l’éternité, car aucune nouvelle résurrection ne provient de cette mort-là. J’ai dit que ce feu est éternel et que tous les artisans de scandales et d’iniquités s’y retrouveront. Ne croyez pas non plus que ce sera au moment de la fin du monde. Non, car au contraire, la terrible révision de vie sera suivie de cette demeure, plus impitoyable, de larmes et de tourments: en effet, ce qui est encore permis à ses hôtes comme divertissement infernal – le pouvoir de nuire aux vivants et la vue de nouveaux damnés être précipités dans l’abîme – n’existera plus. La porte du royaume infâme de Satan sera fermée, boulonnée par mes anges pour toujours, pour toujours, pour toujours, un toujours dont le nombre d’années est sans nombre. En comparaison, si les grains de sable de tous les océans de la terre devenaient des années, ils formeraient moins d’une journée de mon éternité impossible à mesurer, faite de lumière et de gloire en haut pour les bienheureux, mais de ténèbres et d’horreur pour les maudits dans les profondeurs.
Je t’ai déjà dit que le purgatoire est un feu d’amour. Mais l’enfer est un feu de sévérité.
Le purgatoire est un lieu dans lequel vous expiez vos manques d’amour pour votre Seigneur Dieu en pensant à lui, dont l’Essence a brillé devant vous au moment de votre jugement particulier et vous a remplis du désir de la posséder. Par l’amour, vous conquérez l’Amour et, en passant par des degrés croissants de charité enflammée, vous lavez vos vêtements jusqu’à les rendre purs et lumineux pour entrer dans le royaume de la Lumière, dont je t’ai montré les splendeurs il y a quelques jours.


L’enfer est un lieu où la pensée de Dieu, le souvenir de Dieu entrevu lors du jugement particulier n’est pas, comme pour l’âme du purgatoire, un saint désir, une nostalgie déchirante mais pleine d’espoir, une espérance faite d’attente tranquille, de paix assurée qui atteindra la perfection quand elle sera devenue conquête de Dieu, mais qui donne déjà à l’âme du purgatoire une joyeuse activité purifiante, puisque chaque souffrance, chaque instant de souffrance l’approche de Dieu, son amour. En enfer, la pensée de Dieu est remords, ressentiment, damnation, haine. Haine contre Satan, haine contre les hommes, haine contre soi-même.
Après avoir, pendant leur vie, adoré Satan à ma place, maintenant qu’ils le possèdent et en voient le véritable aspect, qui n’est plus caché sous le sourire ensorcelant de la chair, sous l’éclat lumineux de l’or, sous le signe puissant de la suprématie, ils le haïssent pour avoir causé leurs tourments.
Après avoir oublié leur dignité d’enfants de Dieu au point d’adorer les hommes jusqu’à devenir des assassins, des voleurs, des escrocs, des marchands d’immondices pour eux-mêmes, maintenant qu’ils retrouvent les patrons pour lesquels ils ont tué, volé, escroqué, vendu leur propre honneur comme celui de tant de créatures malheureuses, faibles, sans défense, en se faisant l’instrument d’un vice que les animaux ne connaissent pas – la luxure, cet attribut de l’homme empoisonné par Satan –, maintenant donc ils les haïssent pour avoir provoqué leurs tourments.
Après s’être adorés eux-mêmes en accordant toute satisfaction à la chair, au sang ainsi qu’aux sept appétits de leur chair et de leur sang, foulant ainsi aux pieds la Loi de Dieu et celle de la moralité, ils se haïssent maintenant parce qu’ils se rendent compte qu’ils se sont eux-mêmes causé leurs tourments.
Le mot “Haine” recouvre ce royaume immense; il rugit au milieu de ces flammes; il hurle sous les ricanements des démons; il sanglote et crie au milieu des lamentations des damnés; il résonne, résonne, résonne, comme une cloche qui sonne éternellement le tocsin; il retentit comme un buccin éternel; il remplit chaque recoin de cette prison; il est en lui-même un tourment car, chaque fois qu’on l’entend, il ranime le souvenir de l’Amour perdu à jamais, le remords d’avoir voulu le perdre et la rage de ne plus jamais pouvoir le revoir.
Au milieu de ces flammes, l’âme morte, à l’instar de ces corps jetés au bûcher ou dans les fours crématoires, se tord et crie comme si elle était de nouveau animée par un mouvement de vie, elle se réveille pour comprendre son erreur puis meurt et renaît à chaque instant dans d’atroces douleurs, car le remords la tue sous un blasphème et ce meurtre la ramène à vivre un nouveau tourment. Le crime d’avoir trahi Dieu dans le temps reste devant l’âme pour l’éternité; l’erreur d’avoir refusé Dieu dans le temps lui est éternellement présente, pour son tourment.
Dans le feu, les flammes singent les spectres de ce qu’ils ont adoré pendant leur vie, les passions se peignent en ardents coups de pinceau sous leurs aspects les plus appétissants et elles crient, crient leur mémento: “Tu as voulu le feu des passions. Reçois maintenant le feu allumé par Dieu, dont tu as tourné en dérision le saint Feu.”
Le feu répond au feu. Au paradis, il est feu d’amour parfait. Au purgatoire, il est feu d’amour purificateur. En enfer, il est feu d’amour offensé. Puisque les élus ont aimé à la perfection, l’Amour se donne à eux avec toute sa perfection. Puisque les âmes du purgatoire ont aimé tièdement, l’Amour devient flamme pour les amener à la perfection. Puisque les maudits ont brûlé de tous les feux, sauf du Feu de Dieu, le Feu de la colère de Dieu les brûle pour l’éternité. Or au sein de ce feu se trouve aussi un froid glacé.
Oh! Vous ne pouvez vous imaginer ce qu’est l’enfer. Prenez tout ce qui tourmente l’homme sur terre: le feu, les flammes, le gel, les eaux qui submergent, la faim, le sommeil, la soif, les blessures, les maladies, les plaies, la mort... Additionnez-les et multipliez ce total des millions de fois: vous n’aurez qu’une pâle image de cette terrible vérité.
Un froid sidéral se mêlera à une chaleur insoutenable. Les damnés ont brûlé de tous les feux humains mais n’auront eu qu’une vie spirituelle glacée pour leur Seigneur Dieu. C’est donc le gel qui les attend pour les congeler après que le feu les aura salés comme du poisson mis à rôtir sur une flamme. Le fait de passer de la chaleur brûlante qui fait fondre au froid glacé qui condense est un tourment de plus.
Oh ! Ce n’est pas là un langage métaphorique, car Dieu peut faire en sorte que les âmes, lourdes des fautes qu’elles ont commises, aient une sensibilité égale à celle de la chair, même avant qu’elles ne revêtent cette chair. Vous ne savez pas et ne croyez pas. Mais je vous dis, en vérité, que mieux vaudrait pour vous subir tous les tourments de mes martyrs plutôt que passer une seule heure dans les tortures de l’enfer.
Le troisième tourment, ce sera l’obscurité. Une obscurité matérielle et spirituelle. Se trouver pour toujours dans les ténèbres après avoir vu la lumière du paradis, être étreint par la Ténèbre après avoir vu la Lumière qui est Dieu! Se débattre dans l’horreur noire où seul s’illumine, au réverbère de l’esprit brûlant, le nom du péché qui leur a valu d’être plongés dans une telle horreur!
Ne trouver aucun appui dans ce remue-ménage d’âmes qui se haïssent et se nuisent mutuellement, si ce n’est dans le désespoir qui les rend fous et toujours plus maudits. S’en nourrir, s’appuyer sur lui, se tuer avec lui. La mort nourrira la mort, est-il dit. Le désespoir est mort et nourrira ces morts pour l’éternité.

Je vous le dis, moi qui pourtant ai créé cet endroit: quand j’y suis descendu pour tirer des limbes ceux qui attendaient ma venue, j’ai eu horreur, moi qui suis Dieu, de cette horreur et, si une chose faite par Dieu n’était immuable, parce que parfaite, j’aurais voulu le rendre moins atroce, car je suis l’Amour et j’ai souffert de cette horreur.
Or vous, vous voulez y aller!


Mes enfants, méditez ce que je vous dis. On donne aux malades des médicaments amers, les endroits atteints par le cancer sont cautérisés et le mal excisé. Pour vous, qui êtes malades et cancéreux, ma parole est médicaments et cautère chirurgical. Ne la refusez pas. Servez-vous-en pour vous guérir. La durée de la vie n’est pas ces quelques jours passés sur la terre. La vie commence quand elle vous semble finir et elle ne finit pas.
Faites en sorte qu’elle se déroule là où la lumière et la joie de Dieu rendent l’éternité belle et non pas là où Satan est le bourreau éternel.»

Maria Valtorta, «Les Cahiers de 1944», 15 janvier, pp. 60-65

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